L’expropriation est devenue une procédure largement utilisée du fait des nombreuses opérations d’urbanisme et d’aménagement. Il s’agit du transfert d’un bien du patrimoine privé vers un patrimoine public. Cette procédure porte atteinte au droit de propriété. Ainsi, il convient de voir dans quelles mesures elle peut être légale.
Dans cet article, nous explorons en profondeur le concept d’expropriation, un processus juridique complexe et essentiel en droit français. Nous aborderons la procédure d’expropriation sous tous ses angles, en examinant comment le Code de l’expropriation et les décisions du juge influencent la vie des propriétaires.
De l’étape initiale de la déclaration d’utilité publique à l’ordonnance finale de transfert de propriété, chaque aspect sera scruté. Notre objectif est de fournir un éclairage précis sur les indemnités accordées et les implications légales pour les parties concernées, en s’appuyant sur des articles juridiques clés et la jurisprudence récente.
Que vous soyez un propriétaire potentiellement exproprié ou simplement intéressé par le droit immobilier français, cet article promet de vous offrir des insights précieux.
Après avoir lu cet article, vous saurez :
- Comprendre ce qu’est l’expropriation en droit français, y compris sa définition juridique et le cadre légal qui la régit.
- Identifier comment l’utilité publique est déterminée et son importance cruciale dans le processus d’expropriation.
- Maîtriser les différentes étapes du processus juridique d’expropriation, de la déclaration d’utilité publique à l’offre d’indemnisation.
- Reconnaître les droits des propriétaires et les moyens de les défendre face à une expropriation.
- Appréhender l’évolution du droit de l’expropriation en France et son impact pratique.
L'objet de l'expropriation
Conformément à l'article 17 de la DDHC, l'expropriation a pour objet de réaliser le transfert forcé de la propriété d'un bien ou d'un droit réel dans un but d'utilité publique, moyennant le paiement d'une juste et préalable indemnité, lorsque la nécessité publique l'exige. Le cadre juridique de l'expropriation repose depuis 2015 sur le code de l'expropriation.
L’expropriation constitue la quintessence matérielle de l’atteinte au droit de propriété, en ce sens par ses effets graves et irréversibles, il est encadré strictement par des contraintes juridiques et procédurales.
Cette opération est le moyen le plus radical d’acquérir des terrains en dépit de la résistance des propriétaires, afin de les équiper et les aménager. Les bénéficiaires de l’expropriation peuvent être des terrains privés pour la réalisation d’opérations en particulier la construction de réserves foncières pouvant être.
Par principe et conformément à l'article L.11-1 du code de l'expropriation, l'expropriation ne peut porter que sur des biens immobiliers privés dès lors qu'ils sont sur le territoire national (CE 7 juin 1985, Cmne de Chooz), par exception le législateur a étendu le champs de l'expropriation à quelques biens mobiliers tel que les fonds de commerce (CE, 17 octobre 1973, n°86009).
Les finalités légitimes de l’expropriation se sont diversifiées au fil du temps par le développement de l’urbanisme opérationnel. Ainsi la jurisprudence soutient que certains motifs peuvent frapper d’illégalité une expropriation : un intêret financier exclusif, un intêret privée exclusif.
Les acteurs de l'expropriation
Le pouvoir d’expropriation revient à l’Etat. Cette mainmise étatique se manifeste à chaque étape de la procédure, seules les autorités de l’état étant habilités à ouvrir l’enquête publique et à proclamer l’utilité publique (Code expropriation L. 121-1) et à proclamer l’arrêté de cessibilité.
Le pouvoir d’expropriation peut être à l’initiative :
- de l’Etat,
- des collectivités territoriales,
- des établissements publics,
- ou encore certaines personnes privées comme les concessionnaires de l’administration.
La finalité de l'expropriation
- L’expropriation est gouvernée par un objectif de la satisfaction de l’utilité publique. Le projet doit être motivé par un objectif d’intêret général, pour que tel soit le cas il doit pas concourir à la satisfaction d’intêret purement privés (CE 17 sept 1999 Nasica).
- Le projet d’expropriation doit être nécessaire à l’expropriant, c’est à dire qu’il ne doit pas disposer des terrains nécessaires pour assurer l’opération projetée, donc que la personne publique n’aurait pas pu mobiliser son propre patrimoine. L’opération doit toujours revêtir un caractère subsidiaire (CE 29 juin 1979, Malardel). Toutefois, le juge est limité dans ses pouvoirs car il se refuse de contrôler l’opportunité du choix de l’appréciation de l’administration d’exproprier au regard de solutions subsidiaires.
- En dernier lieu, le juge pour vérifier la légalité de l’opération fait un un bilan coût/avantages conformément à la jurisprudence du Conseil Etat, Ville nouvelle EST (CE 28 Mai 1971). Le juge au regard de l’opération projetée va s’assurer que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d’ordre social ne sont pas excessifs par rapport à l’intêret général que l’opération comporte.
La procédure d'expropriation
La procédure d'expropriation comprend une phase devant le juge administratif et une phase devant le juge judiciaire pour allouer l'indemnité.
La phase administrative
Toute procédure d’expropriation débutera par une enquête publique pour permettre à la population de s’intéresser à l’utilité publique du projet et ses conséquences concrètes. L’ouverture de l’enquête publique est faite par le préfet. En fonction des résultats de cette enquête l’utilité publique du projet sera déclaré, par une déclaration d’utilité publique. Elle doit être signée dans le délai de un an après l’enquête publique. L’objet de la DUP permet d’affirmer l’utilité publique de l’opération mais également d’autoriser l’acquisition des biens concernés.
La DUP pourra faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif compétent. En pratique, c’est à ce stade que de nombreux recours sont intentés par les requérants en contestant l’utilité publique de l’opération envisagée.
Pour achever la phase administrative de l’expropriation, un arrêté de cessibilité sera adopté par le préfet pour déclarer cessible les propriétés à exproprier dont il doit désigner précisément la consistance et l’identité des propriétaires. Un recours pour être formé également contre cet acte.
La phase judiciaire de l'expropriation
Le juge judiciaire intervient dans cette procédure comme gardien de la propriété privée immobilière. Il intervient donc à la fin du processus pour ordonner le transfert de propriété et statuer sur une indemnisation juste et préalable pour pallier les effets de la dépossession.
Le juge judiciaire est saisie dans un délai de six mois après l’arrêté de cessibilité, le préfet devra saisir le juge de l’expropriation afin qu’il prononce une ordonnance de transfert de propriété.
Conformément à l'article L.321-1 du code de l'expropriation, il appartient au juge de fixer une indemnisation pour couvrir la totalité du préjudice. Cette indemnisation peut couvrir aussi bien les propriétaires, que les titulaires du bail d'un bien exproprié (Civ, 31 mars 2004, SCI Lemoine).
Attention, toutefois seuls les propriétaires titulaires de droit légitimes pourront être indemnisés, tel n’est pas le cas du propriétaire d’une construction immobilière (CE, 7 juillet 1989 Pedro).
Que retenir de l'expropriation ?
L’expropriation, une procédure complexe et réglementée, s’articule autour de l’utilité publique et de la juste indemnisation. Elle engage les autorités publiques à acquérir des biens privés pour des projets d’intérêt général, toujours dans le respect des droits des propriétaires. La légitimité de l’expropriation repose sur l’utilité publique, une notion clé encadrée par des lois spécifiques, comme l’article L1 du Code de l’expropriation. La procédure d’expropriation, détaillée dans ce code, s’effectue en deux phases principales : administrative et judiciaire, impliquant une enquête publique et l’ordonnance d’expropriation . L’indemnisation, élément crucial, est fixée par le juge de l’expropriation, assurant une compensation équitable pour le bien et les préjudices subis.
Un avocat spécialisé en droit de l’urbanisme et de l’expropriation peut efficacement assister les parties concernées dans ces procédures, offrant conseil et représentation devant les tribunaux
Vos questions et nos réponses
Bienvenue dans notre section FAQ, où nous abordons les questions fréquemment posées sur l'expropriation en France. Ces réponses visent à éclairer les aspects juridiques et pratiques de ce processus complexe.
L’expropriation est une procédure légale qui permet à une entité publique de contraindre un particulier ou une entreprise à céder son bien immobilier pour un projet d’utilité publique. Elle est encadrée par des règles strictes pour garantir l’équité et le respect des droits des propriétaires.
La procédure d’expropriation comprend deux phases principales : une phase administrative, incluant une enquête publique et la déclaration d’utilité publique, et une phase judiciaire où le juge fixe l’indemnité d’expropriation.
L’indemnité d’expropriation est fixée par le juge de l’expropriation et doit couvrir la valeur du bien ainsi que tout préjudice subi par l’exproprié. Cette indemnité prend en compte la valeur du marché et les pertes financières éventuelles.
L’expropriation se justifie sur la base de l’utilité publique. Cela signifie que le projet pour lequel le bien est requis doit servir l’intérêt général, comme le développement d’infrastructures ou des projets environnementaux, conformément à l’article L1 du Code de l’expropriation.
Oui, les décisions d’expropriation peuvent être contestées. Le propriétaire peut s’opposer à la déclaration d’utilité publique ou au montant de l’indemnisation devant le tribunal administratif. La contestation doit être faite dans des délais spécifiques et fondée sur des arguments juridiques solides
Article co-écrit avec Margaux CAFFAREL, juriste en droit public des affaires.